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Numéro 3
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CONSEIL D’ÉTAT –?ARRÊT N°?255.379 (XIe CHAMBRE), DU 23 DÉCEMBRE 2022

Année 2023 Volume 2023 Numéro 3 Page 564 Langue Français Juridiction Raad van State - Conseil d’Etat, 23/12/2022 Référence “CONSEIL D’ÉTAT –?ARRÊT N°?255.379 (XIe CHAMBRE), DU 23 DÉCEMBRE 2022”, APT 2023, nr. 3, 564-565 Résumé Un événement ne constitue un cas de force majeure que s'il présente un caractère irrésistible, imprévisible et extérieur à la personne qui s'en prévaut. L'erreur invincible, qui peut être invoquée pour justifier le non-respect d'une disposition légale ou réglementaire, est une erreur que toute personne normalement prudente et raisonnable placée dans les mêmes circonstances aurait commise. Une erreur d'encodage ne constitue pas une erreur invincible. La seule circonstance qu'une partie requérante aurait effectué un premier virement, insuffisant, dans le délai de trente jours visé par l'article 71, alinéa 4, de l'arrêté du Régent du 23 août 1948 déterminant la procédure devant la section du contentieux administratif du Conseil d'État, et complété ce virement par un autre, après avoir reçu le courrier du greffe l'informant du fait que le compte n'avait pas été crédité du montant de 222?euros visé aux articles 66, 1° et 6°, et 70, § 1 er , alinéa 1 er , 2°, de l'arrêté du Régent du 23 août 1948 déterminant la procédure devant la section du contentieux administratif du Conseil d'État, et de l'article 6 de l'arrêté royal du 30 novembre 2006 déterminant la procédure en cassation devant le Conseil d'État, permet certes d'établir qu'elle ne s'est pas désintéressée du paiement, mais cet élément est étranger au constat du défaut de crédit suffisant du compte financier du service compétent du SPF Finances, élément justifiant en soi, conformément à l'article 71, alinéa 4, précité, la décision de réputer non accompli ou de rayer du rôle la demande ou le recours introduit. Aucune disposition n'impose au greffe d'avertir, dans le délai de paiement de trente jours, une partie qu'elle n'a pas ou qu'elle n'a qu'imparfaitement effectué le paiement du droit et de la contribution, visés aux articles 66, 1° et 6°, et 70, § 1 er , alinéa 1 er , 2°, de l'arrêté du Régent du 23 août 1948 déterminant la procédure devant la section du contentieux administratif du Conseil d'État, et de l'article 6 de l'arrêté royal du 30 novembre 2006 déterminant la procédure en cassation devant le Conseil d'État, qui ont été réclamés après l'introduction du recours. La circonstance qu'il aurait pu être procédé de la sorte sous l'empire d'une ancienne réglementation sur le paiement des droits ou dans la période suivant directement l'entrée en vigueur d'une nouvelle version de l'article 71, alinéa 4, de l'arrêté du Régent, précité, n'implique aucunement qu'une telle obligation aurait pesé sur le greffe en l'espèce et que la partie requérante pourrait s'en prévaloir. Une partie requérante qui n'a qu'imparfaitement effectué le paiement du droit et de la contribution, visés aux articles 66, 1° et 6°, et 70, § 1 er , alinéa 1 er , 2°, de l'arrêté du Régent du 23 août 1948 déterminant la procédure devant la section du contentieux administratif du Conseil d'État, et de l'article 6 de l'arrêté royal du 30 novembre 2006 déterminant la procédure en cassation devant le Conseil d'État, ne peut valablement se plaindre de l'impossibilité de régulariser le paiement du droit et de la contribution alors qu'une telle hypothèse existerait en cas d'introduction d'une requête incomplète. En effet, dans cette dernière hypothèse, à l'instar de l'invitation à payer le droit et la contribution, le greffe adresse une invitation à régulariser la requête et n'adresse aucun rappel au cas où le requérant ne donne pas correctement suite à cette invitation. Le requérant est donc placé dans la même situation dans les deux cas. L'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas applicable au contentieux de l'accès au territoire, qui ne porte pas sur des droits et obligations de caractère civil et ne concerne pas une accusation en matière pénale. Cette disposition n'est donc pas pertinente, dans un tel litige, pour apprécier la validité du mécanisme organisé par l'article 6 de l'arrêté royal du 30 novembre 2006 déterminant la procédure en cassation devant le Conseil d'État et par l'article 71 de l'arrêté du Régent du 23 août 1948 déterminant la procédure devant la section du contentieux administratif du Conseil d'État. La règle procédurale consacrée par l'article 6 de l'arrêté royal du 30 novembre 2006 déterminant la procédure en cassation devant le Conseil d'État et par l'article 71 de l'arrêté du Régent du 23 août 1948 déterminant la procédure devant la section du contentieux administratif du Conseil d'État s'avère suffisamment claire et précise et ne peut, sous peine de porter atteinte à la sécurité juridique et au principe d'égalité et de non-discrimination – et sous la seule réserve d'un cas de force majeure ou d'erreur invincible –, souffrir de tempéraments selon la situation particulière de chaque partie requérante. Les droits procéduraux et les obligations procédurales vont normalement de pair et une partie doit assumer les erreurs procédurales qui lui sont objectivement imputables, en particulier lorsqu'elle est assistée d'un conseil qualifié censé connaître les conditions énoncées par une disposition, et a fortiori lorsque la sanction du non-respect de ces règles a été explicitement précisée dans le courrier de notification susvisé. S'il est exact que la sanction du défaut de paiement des droits de rôle dans le délai imparti est lourde de conséquences, le droit d'accès au juge n'est cependant pas absolu. À cet égard, il y a lieu de relever que la restriction à ce droit fondamental qu'emporte le mécanisme mis en place poursuit un but légitime, mis en évidence dans le rapport au Roi précédant l'arrêté royal du 25 décembre 2017 modifiant divers arrêtés relatifs à la procédure devant la section du contentieux administratif du Conseil d'État, à savoir «?empêcher qu'un requérant reporte pour une durée indéterminée l'examen du bien-fondé de son recours et la décision concernant celui-ci, et pendant ce temps, entretienne l'incertitude concernant la validité de l'acte qu'il attaque, à l'insu tant de l'autorité dont cet acte émane que de toutes les autres parties intéressées, avec toutes les conséquences préjudiciables qui en découlent?» (M.B., 26 juin 2018, p. 5930). Ainsi qu'a déjà pu le relever la Cour constitutionnelle s'agissant d'autres obligations procédurales, il peut être attendu de toute partie requérante qu'elle coopère au déroulement rapide et efficace de la procédure devant le Conseil d'État (Cour. const., arrêt n° 150/2001, 20 novembre 2001, B.5?; Cour const., arrêt n° 103/2015, B.40.3). Du reste, compte tenu de la durée raisonnable du délai imparti pour s'acquitter du droit de rôle et de la possibilité de démontrer l'existence d'une force majeure ou d'une erreur invincible, ce mécanisme ne restreint pas de manière disproportionnée le droit d'accès au juge. Le fait que le Roi dans son arrêté royal du 25 décembre 2017 modifiant divers arrêtés relatifs à la procédure devant la section du contentieux administratif du Conseil d'État n'a pas poursuivi d'objectif particulier propre à la procédure en cassation ne permet pas de conclure que le renvoi à l'article 71 de l'arrêté du Régent du 23 août 1948 déterminant la procédure devant la section du contentieux administratif du Conseil d'État serait dépourvu de justification. Il convient d'admettre que c'est le même objectif de sécurité juridique que celui qui a justifié l'adoption de l'article 71, précité, qui fonde l'application de cette disposition au contentieux de la cassation. La partie défenderesse en cassation et les parties intervenantes dans la procédure devant le premier juge ne se trouvent pas, à l'égard de l'objectif de sécurité juridique, dans une situation différente de celle de la partie adverse ou d'une potentielle partie intervenante dans le cadre d'une procédure en annulation. L'objectif de sécurité juridique en cassation est ainsi identique à celui applicable en annulation. La mesure prescrite par l'article 6 de l'arrêté royal du 30 novembre 2006 déterminant la procédure en cassation devant le Conseil d'État et par l'article 71 de l'arrêté du Régent du 23 août 1948 n'est pas disproportionnée par rapport au droit d'accès à un juge et il n'y a pas lieu d'en écarter l'application.

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